Grande-Synthe : le gérant d'une mosquée poursuivi pour «blanchiment»
Le gestionnaire de la mosquée Al Houda de Grande-Synthe (Nord) sera jugé en juillet pour «abus de confiance», «blanchiment de fraude fiscale» et «escroquerie aux prestations sociales», suite à une enquête sur le financement opaque de deux biens immobiliers, a-t-on appris jeudi 12 mai auprès du parquet.
Amirouche O., âgé de 47 ans, faisait l'objet depuis plusieurs mois d'une enquête préliminaire portant sur le financement de ces deux biens, achetés «à son nom», pour un montant d'environ 350.000 euros, «alors qu'il déclare aux impôts zéro euro de revenu depuis des années», a expliqué à l'AFP le parquet de Dunkerque.
Ces locaux abritent l'association fraternelle du quartier Saint-Jacques, qui gère la mosquée Al Houda, et l'association Maisons de savoir, «dont le but est l'accompagnement scolaire des enfants». Ces associations sont présidées par Amirouche O., «de droit» pour la première et «de fait» pour l'autre, a-t-on précisé de même source.
Détention provisoire et contrôle judiciaire
Amirouche O. a été interpellé mardi matin en même temps que sa sœur Fatiha, 49 ans, présidente de «Maisons de savoir». Elle est renvoyée devant le tribunal pour «abus de confiance» et «complicité de blanchiment». Ils ont été présentés jeudi au parquet, qui a «requis la détention provisoire pour lui et un contrôle judiciaire pour elle».
Amirouche O. est aussi poursuivi pour avoir continué les activités de la mosquée, alors que la municipalité avait pris un arrêté en novembre 2018, pour fermer les locaux en raison d'infractions aux consignes de sécurité. Les perquisitions menées mardi ont permis de constater au sein de ces locaux «la présence d'une école», qui «fait l'objet d'une enquête incidente», pour «ouverture d'un établissement d'enseignement privé sans autorisation»(1), a ajouté le parquet. Les trésoriers des deux associations, interpellés mardi, ont été relâchés sans poursuites.Le quadragénaire «alimentait» d'une part son compte personnel «avec des fonds provenant de dons à ces associations», qu'il allait notamment «chercher à l'étranger». Le reste des fonds nécessaires à l'acquisition des biens «a été versé directement entre les mains du notaire par l'association Maisons du savoir, ou par des tierces personnes, sous forme de prêts personnels qui n'ont jamais été déclarés à l'administration fiscale», a-t-on précisé.
L'infraction de «blanchiment de fraude fiscale» est «aggravée puisque commise de manière habituelle, depuis au moins avril 2015».
«Islamisation par le bas»
Selon le parquet, le prévenu est proche du mouvement «tabligh», qui promeut une vision «prosélyte» de l'islam. Le tabligh (ou Tablighi Jamaat, en français «Association pour la prédication») est un mouvement transnational de prédication de masse, né en Inde en 1927, Son fondateur Muhammas Ilyas prônait une pratique individuelle pure proche de la vie menée par le Prophète, et une interprétation strictement littérale du Coran autour de six principes fondateurs : croyance un Dieu unique, Allah, la prière, la profession de foi, la connaissance de Dieu, la dévotion personnelle aux autres et la prédication.
Fondé pour protéger l'identité musulmane indienne contre les assauts de l'hindouisme, le mouvement s'est internationalisé de manière spectaculaire. Propagé en Inde et au Pakistan, il devient à la fin des années 1960 le plus étendu des mouvements islamistes. Il s'exporte alors en Occident et pose sa base chez l'ancien colonisateur, au Royaume-Uni, où aujourd'hui, la moitié des mosquées est dirigée par les tablighis. En France le mouvement est représenté par l'Association Foi et pratique qui contrôle directement 50 lieux de cultes. Leurs adeptes refusent la tenue vestimentaire occidentale, et portent la robe et la barbe.
Au contraire des réseaux des Frères musulmans en France ( UOIF, proches du théologien Tariq Ramadan), le mouvement tabligh ne vise pas un public éduqué, mais une population déshéritée et frustre selon le principe d'une «islamisation par le bas». Ou plutôt une «ré-islamisation», les populations immigrées étant la cible privilégiée des tabligh.
De même contrairement aux Frères musulmans, leurs rivaux, les tablighis n'ont pas de projet politique, et se cantonnent à la sphère religieuse. Théoriquement, ils sont opposés à l'action violente, qu'elle soit politique ou djihadiste. Mais dans les faits, la radicalisation religieuse qu'ils proposent sert parfois de préliminaire, voire de sas de passage vers le terrorisme. Les jeunes de Lunel en sont un exemple. En mai 2013, l'homme qui avait agressé militaire à La défense à l'arme blanche était passé par les réseaux tablighis.
En février 2012, Manuel Valls avait procédé à l'expulsion d'un imam issu de la mouvance tabligh, Mohamed Hammami, fondateur de Foi et pratique , car il prononçait régulièrement des prèches antisémites.
(1) La mosquée de Béthune possède aussi son école animée par l'association Jeunesse Active de Béthune. Nous ne savons si cette dernière est subventionnée par la ville mais nous ne doutons pas que cette école est administrativement dans les clous, grâce aux rélations etroites avec la mairie, l'occupant actuel de fauteiul majoral et son adjoint Hakim El Azouzi.
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