Le député européen fustige les complaisances dont a bénéficié Vladimir Poutine chez nous, mais assure que la France "ne cédera pas aux sirènes des poutinolâtres".
"L'Histoire nous a appris qu'un idéologue au pouvoir, loin de se modérer, se radicalise de plus en plus. Aujourd'hui, on en est là", regrette le député européen Raphaël Glucksmann.
Le député européen Raphaël Glucksmann dénonce les "nationalistes de pacotille" qui auraient repris en cœur la "propagande russe", mais aussi une partie de la gauche trop complaisante, à ses yeux, avec le régime de Poutine. Celui qui préside la commission spéciale sur les ingérences étrangères au Parlement européen avertit que la lutte contre l'idéologie poutinienne se joue à un niveau diplomatique, mais aussi sur un plan culturel à l'intérieur de nos démocraties.
Jusqu'au début de l'invasion de l'Ukraine, de nombreux experts géopolitiques ont assuré que Poutine est un négociateur certes rude, mais rationnel, avec lequel il faut discuter... C'est l'idée qui domine la pensée européenne depuis vingt ans. Le problème, c'est que nous avons du mal à imaginer que quelqu'un ne réfléchisse pas comme nous. Nous sommes tellement imprégnés d'une Europe post-idéologique que nous n'avons pas pu imaginer que l'idéologie ultranationaliste, xénophobe et guerrière d'un Poutine soit autre chose qu'un argument dans les négociations.
Il faut prendre Poutine au mot. Dès ses débuts, il a expliqué que la chute de l'URSS était la "plus grande catastrophe géopolitique du XXe siècle". Cela représente donc un programme de gouvernement. Il faut le croire et il ira jusqu'au bout. L'Histoire nous a appris qu'un idéologue au pouvoir, loin de se modérer, se radicalise de plus en plus. Aujourd'hui, on en est là. Les deux derniers discours de Poutine sont l'aboutissement de vingt ans de radicalisation idéologique. Il a sa propre rationalité, qui ne correspond pas à la nôtre.
Poutine a plusieurs fois évoqué un "génocide" en Ukraine, allant jusqu'à parler d'une "dénazification". Les mots ont-ils encore un sens avec lui ?
C'est le principe même du totalitarisme que de penser le langage comme un outil au service de la puissance. Les mots sont déconnectés du réel. C'est Orwell, ou Alice au pays des merveilles, de Lewis Carroll. Comme l'avait déjà montré la journaliste Anna Politkovskaïa, assassinée en 2006, il y a chez Poutine une entreprise systématique de remplacement des mots. Des termes ont disparu en Russie, tandis que d'autres ont complètement changé de sens.
"Poutine est devenu le parrain idéologique de tous ceux qui rejettent les principes de la démocratie libérale"
Déclencher une guerre en Europe en ayant pour objectif de "dénazifier" une démocratie pluraliste, pro-européenne, qui a élu un président juif dont des ancêtres ont été victimes de la Shoah et où l'extrême droite représente moins de 5% de l'opinion, c'est l'aboutissement de cette abolition du langage.
Poutine avait déjà utilisé le terme de "génocide" en Ossétie du Sud. C'est aussi une manière pour lui de nous cracher au visage, puisqu'il a employé ce mot lors de la conférence de presse face à un chancelier allemand, Olaf Scholz, ce qui n'a rien d'un hasard.
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